Troisième partie : L'écriture du mensonge

 

Du côté de l'auteur de contre-utopies, il s'organise au moyen de l'écriture une lutte désespérée contre les irrésistibles penchants de l'homme pour le totalitarisme, la guerre, la domination et l'aliénation des peuples. Pour Gilles Lapouge, « l'histoire récente a montré que les plans de bonheur universel engendrent souvent des charniers, de grands chantiers d'équarrissage. Le pessimisme des grandes utopies modernes - George Orwell, Aldous Huxley ou Ernst Jünger - s'explique ainsi par la reconnaissance des accointances de l'utopie avec le néant. »[1]. C'est à la même époque, dans les années 1940, que Fritz Lang, déjà largement célèbre, exprimait sa vision du monde contemporain en disant : « Il n'y a que deux catégories d'êtres humains : les mauvais et les très mauvais ». Pourtant, si ces auteurs projettent dans leurs œuvres un monde fictif qu'ils redoutent de voir s'ancrer dans la réalité, il faut aussi considérer leur écriture comme une sorte de “théologie de la dissemblance” dont l'objet n'est plus Dieu mais l'avenir du monde. Ainsi, par la mise en place d'un monde renversé, par l'apologie du contre-nature, par l'exacerbation du malheur, on retrouve le propos de la contre-utopie : le monde dit par ce qu'il n'est pas (encore ?). Une fois, le processus relevé, comment ne pas lire la fin de Nous autres de Zamiatine, celle 1984 d'Orwell, ou du Meilleur des Mondes d'Huxley, de la même manière que celle L'utopie de More : « il y a dans la république utopienne bien des choses que je souhaiterais voir dans nos cités. Je le souhaite, plutôt que je ne l'espère. »[2].

 

A) Le suivi d'un fil d'une trame du récit

Mise en œuvre et évolution d'une mensonge


B) L'écriture de l'art du mensonge

1) A propos du narrateur contre-utopiste
2) Le narrateur et l'art


C) Les trompeuses ambivalences

1) Le normal et le contre-nature
2) Le jeu de la transparence
3) Les fausses vérités